La perception de l’enfant, sa place dans la famille et l’attention portée à son éducation ont considérablement évolué au fil du temps, avec des implications pour la société. Certaines figures enfantines emblématiques de la littérature et leur éducation témoignent de cette transformation du statut de l’enfant à travers les siècles. 

Gargantua, héros géant et jovial de Rabelais au XVIe siècle, représente un enfant démesuré, dont l’éducation, tant physique qu’intellectuelle, est l’enjeu principal. Son apprentissage illustre la vision d’une enfance à dompter pour en faire un adulte accompli. Au XIXe siècle, l’industrialisation et la pauvreté transforment l’image de l’enfant. Il est victime d’une société qui a un besoin important de main d’œuvre et l’attention portée à l’éducation des enfants va donc grandement diminuer. Oliver Twist, le célèbre orphelin de Dickens, incarne cette jeunesse délaissée et vulnérable, évoluant dans un univers impitoyable où la maltraitance est courante. Plus tard, avec des œuvres comme Le Petit Prince de Saint-Exupéry, l’enfant devient porteur d’une sagesse innocente, capable de voir l’essentiel avec un regard pur, loin des préoccupations matérielles des adultes.

Ces personnages littéraires révèlent les métamorphoses sociales et culturelles autour de la place et de l’éducation des enfants dans la société. Ils illustrent la manière dont la société a, à travers les âges, progressivement pris conscience de de la singularité de chaque enfant et de l’importance de leur éducation. La Tribu Happy Kids vous embarque dans une petite histoire de l’éducation et du traitement des enfants à travers les âges. 

Antiquité : éduquer les enfants comme des citoyens en puissance 

L’éducation des enfants en Grèce et à Rome : entre philosophie et châtiments 

Dans l’Antiquité, particulièrement en Grèce et à Rome, les enfants des citoyens jouissant de leurs droits civiques reçoivent une éducation poussée qui vise à les préparer à leur futur rôle dans la société. Le regard porté sur les enfants est positif et leur arrivée est une joie accompagnée d’attentions et de soins (cadeaux, prières aux dieux, présentation à la société). En grandissant, les relations entre les parents et les enfants se structurent autour de la phillia (en grec) ou pietas (latin), qui correspond à un attachement affectif et respectueux mutuel entre les membres de la famille. Même si des acteurs extérieurs à la famille s’impliquent dans l’éducation des enfants, les parents restent les principaux éducateurs de leurs enfants. 

L’éducation des enfants ne commence qu’à l’âge de sept ans. On enseigne aux petits garçons les arts, les lettres, les mathématiques, la philosophie, mais aussi le sport, la musique ou les valeurs morales de force et de vertu militaire afin qu’ils deviennent des citoyens à la fois bons et beaux. Pour être capables de contribuer au bon fonctionnement de la cité il faut être complet : gymnastique, musique, rhétorique…! Les petites filles poussent moins leurs apprentissages. On leur enseigne l’art de tenir une maison et les valeurs qui en feront de bonnes épouses et de bonnes mères. 

Si l’arrivée d’un enfant réjouit et rassure quant à la continuité de la lignée, l’éducation des enfants est stricte, voire parfois violente. Ce thème est récurrent chez les céramistes antiques, dont les œuvres illustrent notamment la fréquence des punitions et des châtiments corporels dans l’éducation des enfants.

La période de l’enfance est un statut particulier dans l’Antiquité, dont la fin est marquée par un événement ou une célébration. L’éducation des enfants s’arrête au moment du mariage pour les filles et des  Liberalia (fêtes) à Rome ou de l’inscription sur les registres civiques en Grèce pour les garçons (Legras, 2007).

Petits bras, grandes responsabilités : l'éducation des enfants dans l’Égypte ancienne  

Dans l'Égypte ancienne, l’éducation des enfants est influencée par des aspects à la fois culturels, spirituels et sociaux. Les enfants étaient considérés essentiels pour la survie de la famille et la perpétuation du culte des ancêtres. Cette importance accordée à la vie et au renouvellement des générations explique le soin particulier apporté aux enfants dans les rites funéraires. Les fouilles archéologiques nous apprennent que, dès l’âge d’un an, les enfants sont momifiés et parés de bijoux. On peut en déduire que les Égyptiens de l’époque percevaient déjà les enfants comme des personnes à part entière. 

Le rôle d’éducateur revenait principalement au père de famille. Il était responsable de l’éducation des enfants et de leur préparation à la vie adulte et à la société. Les pratiques éducatives en Égypte ancienne étaient largement centrées sur la transmission de compétences et de valeurs morales. Très tôt, les enfants prennent part aux travaux agricoles, à la garde des troupeaux, aux tâches domestiques ou aux activités commerciales. Cette contribution au travail familial fait partie de l’éducation des enfants, leur permettant d’intégrer progressivement le monde des adultes et d’assumer leurs futures responsabilités (Kasparian, 2014).

L’éducation des enfants au Moyen-âge : pédagogie douce et images pieuses  

Contrairement aux idées reçues, les enfants étaient perçus avec une grande attention et affection au Moyen Âge. Déjà à l’époque, les pédagogues considéraient que l'éducation marquait durablement les enfants, comparant leur esprit à de la cire molle. Les garçons recevaient une éducation active, tournée vers le monde extérieur, tandis que l’éducation des filles visait à leur inculquer des qualités domestiques et morales. 

L'Église jouait un rôle central dans l’éducation des enfants et influençait fortement la pédagogie : les enfants étaient exposés dès leur plus jeune âge à des images pieuses, comme celles de saints, pour renforcer leur foi.

Les pratiques pédagogiques privilégiaient la parole et l’exemple, plutôt que les châtiments corporels. Les éducateurs plaidaient pour la modération dans l’éducation des enfants, mettant en avant la nécessité d’enseigner par l’affection plutôt que par la peur. L’humanisme, à la fin du Moyen Âge, apporta un vent de renouveau en valorisant les auteurs antiques et en encourageant des méthodes plus douces et plus adaptées aux besoins des enfants.

L’éducation des enfants au Moyen Âge reflétaient un équilibre entre l’autorité religieuse, la formation morale et le développement intellectuel, même si cette attention variait selon le sexe de l’enfant et le milieu social (Lett, 1999).

La Renaissance : le tournant de l’individualité dans l’éducation des enfants

L’éducation des enfants comme êtres spécifiques (et non des mini-adultes)

La Renaissance marque un tournant dans la manière dont les enfants sont perçus et éduqués. Avec l’émergence de l’humanisme, les penseurs commencent à considérer les enfants comme des individus à part entière, dotés d'un potentiel unique. L'éducation des enfants devient un moyen de cultiver cette individualité, plutôt que de simplement préparer l'enfant à un rôle social prédéterminé.

Érasme et Montaigne préconisent une éducation des enfants qui respecte la personnalité de chaque enfant, encourageant la curiosité et l’apprentissage par l'expérience. Montaigne, par exemple, insiste sur l’importance d’éduquer les enfants avec respect et de les encourager à penser par eux-mêmes : 

« On ne cesse de criailler à nos aureilles, comme qui
verseroit dans un entonnoir ; et nostre charge, ce n'est
que redire ce qu'on nous a dict : je vouldrois qu'il cor-
rigeast cette partie; et que, de belle arrivee, selon la
portée de l'ame qu'il a en main, il commenceast à la
mettre sur la montre, luy faisant gouster les choses,
les choisir, et discerner d'elle mesme; quelquefois luy
ouvrant chemin, quelquefois le luy laissant ouvrir. », 

L'histoire de l'enfance à cette époque montre une évolution significative du statut des enfants, qui ne sont plus seulement vus comme des adultes en miniature, mais comme des êtres en développement, avec des besoins et des droits spécifiques.

L'Époque moderne : vers une éducation universelle des enfants

Les Lumières et la révolution éducative des enfants

Le XVIIIe siècle, avec le mouvement des Lumières, apporte une nouvelle approche de l'éducation des enfants. Les philosophes des Lumières, tels que Rousseau, défendent l'idée que les enfants doivent être éduqués de manière naturelle, en respectant leur développement physique et psychologique. Dans son ouvrage Émile ou De l’éducation, Rousseau propose une vision de l'éducation naturelle et bienveillante où l'enfant apprend à travers l'expérience directe, plutôt que par la simple transmission de connaissances, base de ce que l’on appelle aujourd’hui l’éducation positive.

Contrairement aux périodes précédentes, l’époque moderne voit l’émergence d’initiatives qui visent à rendre l’éducation accessible à tous les enfants, indépendamment de leur statut social. L'idée d'une éducation publique et universelle des enfants commence à prendre racine, bien que sa mise en œuvre reste limitée par les structures sociales de l'époque.

L'évolution du statut des enfants durant les Lumières montre une reconnaissance croissante de leur droit à une éducation qui respecte leur individualité. C'est un moment charnière où l’éducation des enfants commence à être vue non seulement comme un privilège, mais comme un droit fondamental.

L’Industrialisation et ses défis pour l’éducation des enfants

L'industrialisation du XIXe siècle apporte de nouveaux défis pour l'éducation des enfants. Si les enfants travaillaient déjà auprès de leurs parents par le passé, l'urbanisation rapide et le développement des usines, contraignent de nombreux enfants à travailler dans des conditions extrêmement difficiles et abusives. Bien que des lois commencent à émerger pour protéger les enfants travailleurs, leur application est souvent laxiste. La littérature regorge d’exemples de ces enfants-ouvriers et Charles Dickens décrit bien leurs conditions de travail très dures avec David Copperfield et Oliver Twist. 

Cette période révèle une société en tension entre le besoin de main-d'œuvre et la reconnaissance croissante des droits des enfants. Les réformes éducatives commencent à se développer, mais elles doivent faire face à des résistances économiques et sociales. Bien souvent à cette époque, l’éducation des enfants ne correspond pas à leurs besoins réels. (Fohlen, 1973) 

L'Époque contemporaine et l'éducation des enfants : une éducation personnalisée, inclusive et adaptée 

Le XXe siècle voit l'émergence de la psychologie de l'enfant, avec des figures influentes comme Jean Piaget et Maria Montessori, qui transforment la manière dont l'éducation des enfants est pensée et pratiquée. L'enfant est désormais vu comme un individu avec des stades de développement spécifiques, nécessitant une approche éducative adaptée à chaque étape de sa croissance. Piaget, par exemple, introduit l'idée que les enfants passent par des stades de développement cognitif, chacun nécessitant des méthodes d'enseignement spécifiques. Montessori, quant à elle, préconise une éducation centrée sur l’enfant, où l’apprentissage est guidé par les intérêts et les rythmes propres à chacun. Cette nouvelle perception des enfants au fil du temps met l’accent sur l’importance de créer un environnement d’apprentissage qui respecte et soutient le développement naturel de l’enfant. L’accompagnement et l’éducation des enfants à chaque étape de leur vie commencent dès le berceau et prennent précisément en compte leurs besoins à chaque âge. Les experts de La Tribu Happy Kids reprennent cette vision de l’éducation des enfants  au sein de leurs outils, et particulièrement dans Ma Boîte Éveil Langage où sont renseignées toutes les étapes du développement du langage en fonction de l’âge des enfants.

Le monde contemporain reconnaît l’existence et la pertinence de différentes manières d'apprendre et les méthodes éducatives se diversifient, allant de l'enseignement traditionnel en classe aux apprentissages en ligne et à domicile. 

Les experts de La Tribu Happy Kids se sont penchés sur ces différents sujets de société comme l’évolution des méthodes pour apprendre à lire, l’école à la maison, ou encore les opportunités qu’offrent les écrans aux apprentissages.

L’éducation inclusive est également devenue un enjeu majeur, avec des efforts pour adapter les programmes et les méthodes pédagogiques aux besoins de tous les enfants, y compris ceux ayant des besoins particuliers.

Un voyage à travers le temps de l'éducation des enfants 

L’éducation des enfants a connu une transformation spectaculaire au fil des siècles. De l'Antiquité, où l'enfant était principalement vu comme un futur citoyen ou un travailleur, à l'époque contemporaine, où il est reconnu comme un individu à part entière avec des droits et des besoins spécifiques, le traitement des enfants à travers les âges reflète les changements profonds de chaque société.

L’histoire de l'enfance nous enseigne que chaque époque a apporté sa contribution unique à la manière dont nous comprenons et pratiquons l’éducation aujourd'hui. En explorant l’évolution du statut des enfants et en examinant leur perception au fil du temps, nous voyons comment les défis et les opportunités de chaque période ont façonné les approches modernes de l'éducation, qui font également débat.

Sources

Legras, B. (2007). Violence ou douceur. Les normes éducatives dans les sociétés grecque et romaine. Histoire de L’éducation, 118, 11-34. 

Kasparian, B. (2014). La condition de l’enfant et du fils aîné dans l’Egypte ancienne, in Enfant et romanité, Analyse comparée de la condition de l’enfant, coll. Méditerranées, 2007, p. 17-64. Univ-larochelle. 

Lett, D. (1999). L’éducation et les conceptions pédagogiques au Moyen Age. Recherches et Prévisions, 57(1), 85-89. 

Fohlen, C. (1973). Révolution industrielle et travail des enfants. Annales de Démographie Historique, 1973(1), 319-325.