Harcèlement scolaire et biologie : conséquences sur la santé des enfants et réponses thérapeutiques

Harcèlement scolaire et biologie : conséquences sur la santé des enfants et réponses thérapeutiques

Dans l’article Le harcèlement  : un sujet qui ne doit pas rester tabou chez les enfants, disponible sur le blog de La Tribu Happy Kids, les conséquences émotionnelles, psychologiques et comportementales du harcèlement ont été abordées. Il s’agit des conséquences les plus connues du harcèlement scolaire  chez les enfants.


Cependant, des recherches scientifiques récentes ont démontré que les enfants victimes de harcèlement à l’école subissent également des effets biologiques notables. Ces impacts incluent des altérations du système endocrinien, des modifications structurelles du cerveau et des perturbations dans les systèmes de réponse au stress.


Dans cet article, La Tribu Happy Kids explore les résultats de ces études afin de comprendre les conséquences biologiques du harcèlement scolaire sur la santé des enfants, ainsi que les réponses thérapeutiques adaptées


Les conséquences biologiques du harcèlement scolaire chez les enfants


Le harcèlement scolaire peut engendrer des effets biologiques profonds, notamment en perturbant le système de réponse au stress, en modifiant la structure du cerveau et en influençant l'expression génétique.


Perturbations du système de réponse au stress face au harcèlement scolaire chez les enfants

Le harcèlement, surtout durant l'enfance, active de manière excessive le système de réponse au stress, notamment l'axe hypothalamo-hypophyso-surrénalien (HHS), responsable de la libération de cortisol, l'hormone du stress (McEwen, 2012). 

Une exposition répétée à des situations de harcèlement peut entraîner une hyperactivation de cet axe, augmentant ainsi les niveaux de cortisol, ce qui perturbe l'équilibre neurochimique dans le cerveau. Ces enfants montrent souvent une réactivité accrue au stress, et dans certains cas, une diminution paradoxale des niveaux de cortisol après une exposition prolongée au harcèlement (Ouellet-Morin et al., 2011). Une régulation dysfonctionnelle du cortisol est associée à des problèmes de santé mentale, comme la dépression et l'anxiété (Gunnar & Quevedo, 2007).



Changements structurels dans le cerveau causés par le harcèlement à l’école des enfants

Les expériences de harcèlement scolaire chez un enfant peuvent également avoir un impact direct sur le développement structurel de son cerveau. Des études de neuroimagerie montrent que les enfants victimes de harcèlement scolaire présentent des réductions de volume dans certaines régions du cerveau, telles que l'hippocampe et l'amygdale (Teicher et al., 2016). 

L'hippocampe joue un rôle crucial dans la mémoire et la régulation du stress, tandis que l'amygdale est impliquée dans la gestion des émotions, en particulier la peur et l'anxiété. Ces altérations cérébrales peuvent expliquer en partie pourquoi les enfants harcelés sont plus susceptibles de développer des troubles émotionnels à long terme, tels que le trouble de stress post-traumatique (TSPT) ou des difficultés d'adaptation.


Impact du harcèlement scolaire des enfants sur leur expression génétique 

Le harcèlement scolaire subi par un enfant peut influencer son expression génétique à travers des mécanismes épigénétiques. L'épigénétique se réfère aux modifications qui affectent l'expression des gènes sans changer la séquence de l'ADN. 

Des recherches ont montré que les enfants victimes de harcèlement scolaire présentent des changements épigénétiques au niveau des gènes impliqués dans la régulation du stress, notamment le gène NR3C1, qui joue un rôle clé dans la sensibilité au cortisol (Ouellet-Morin et al., 2013). Ces modifications épigénétiques peuvent altérer la façon dont les enfants réagissent au stress et peuvent même prédisposer les individus à des problèmes de santé mentale tout au long de la vie.



Perturbations immunitaires chez l’enfant victime de harcèlement à l’école.

Le harcèlement scolaire chez les enfants est également associé à des perturbations immunitaires. Des études ont révélé que les enfants victimes de harcèlement présentent des niveaux accrus d'inflammation systémique, mesurés par des marqueurs tels que la protéine C-réactive (Copeland et al., 2014). 

Une inflammation chronique est un facteur de risque pour plusieurs maladies, y compris les maladies cardiovasculaires et les troubles métaboliques. Cela indique que les conséquences du harcèlement scolaire peuvent s'étendre au-delà de la santé mentale et toucher la santé physique des enfants à long terme.


Les réponses thérapeutiques existantes face aux conséquences biologiques du harcèlement scolaire chez les enfants


Bien que les effets biologiques du harcèlement scolaire sur les enfants puissent être graves, des interventions précoces et adaptées peuvent atténuer, voire inverser certaines de ces conséquences. Plusieurs stratégies basées sur des approches psychothérapeutiques, pharmacologiques et sociales ont montré une efficacité pour réduire les impacts négatifs sur le développement des enfants.


Les interventions thérapeutiques pour faire face au harcèlement scolaire des enfants

Les approches thérapeutiques, notamment la thérapie cognitivo-comportementale (TCC), sont parmi les interventions les plus efficaces pour traiter les enfants victimes de harcèlement. La TCC aide les enfants à comprendre et à modifier leurs pensées et comportements face aux situations de stress, ce qui peut réduire les niveaux de cortisol et améliorer leur bien-être émotionnel (Gonzalez et al., 2014). En modifiant la manière dont les enfants perçoivent et réagissent au stress, cette thérapie peut rétablir une régulation saine du système de réponse au stress et limiter les effets négatifs à long terme.


Un autre type d'intervention thérapeutique, la pleine conscience, a également montré des résultats prometteurs. Une étude menée par Johnson et al. (2016) a démontré que la pratique de la méditation de pleine conscience réduit les niveaux de cortisol et d'anxiété chez les enfants et adolescents, améliorant ainsi leur régulation émotionnelle. En réduisant les effets biologiques du stress, la pleine conscience contribue à diminuer l'inflammation systémique et les réponses physiologiques néfastes liées au harcèlement à l’école des enfants.



Ces approches thérapeutiques alternatives sont régulièrement utilisées dans le cadre de la prise en charge des enfants, notamment ceux souffrant de stress chronique ou d’anxiété, comme cela peut-être le cas dans les situations de harcèlement. La Tribu Happy Kids a notamment rédigé un article à propos des thérapies et méthodes alternatives !


L’importance du soutien social et des interventions scolaires en cas de harcèlement à l’école.

Le soutien social joue un rôle clé dans la résilience des enfants victimes de harcèlement scolaire. Un réseau de soutien solide, incluant les parents, les enseignants et les pairs, peut atténuer les impacts biologiques négatifs. Des études montrent que le soutien social réduit les réponses physiologiques au stress, notamment en diminuant les niveaux de cortisol (Hostinar et al., 2014). Les programmes scolaires qui promeuvent des environnements inclusifs et qui enseignent la gestion des conflits sont essentiels pour prévenir le harcèlement scolaire chez les enfants et favoriser des relations interpersonnelles positives.

Les interventions basées sur l'apprentissage socio-émotionnel (ASE) dans les écoles sont également efficaces pour renforcer la résilience des enfants face au harcèlement scolaire. Ces programmes aident les enfants à développer des compétences telles que l'empathie, la gestion des émotions et la résolution de problèmes, réduisant ainsi la vulnérabilité aux effets du harcèlement scolaire (Durlak et al., 2011). Une meilleure gestion des émotions peut limiter l'hyperactivation de l'axe HHS, diminuant les risques d'hyper-réactivité au stress.

À la maison, il est possible d’utiliser des outils pour permettre à l’enfant d’identifier et de comprendre ses émotions, afin d’ouvrir la discussion avec lui.  Le Kit de Médiation Émotionnelle de La Tribu Happy Kids a été conçu spécifiquement pour aider les enfants à reconnaître, nommer et exprimer leurs émotions à travers une série d'activités ludiques et pédagogiques

L'idée derrière cette approche est d'aider les enfants à mieux se connaître pour gérer plus efficacement leurs émotions. Le Kit de Médiation Émotionnelle met également l'accent sur la confiance en soi et le développement des relations interpersonnelles saines.



Les bénéfices des exercices physiques face aux conséquences biologiques du harcèlement

L'activité physique régulière a été identifiée comme un facteur protecteur important pour les enfants victimes de harcèlement scolaire. Elle est associée à une amélioration des fonctions cognitives, une réduction du stress, et une neuroplasticité accrue. L'exercice favorise la production de facteurs neurotrophiques tels que le BDNF (brain-derived neurotrophic factor), qui est essentiel pour la croissance et la réparation des neurones dans l'hippocampe, une région souvent affectée par le stress chronique (Voss et al., 2013). En renforçant les circuits neuronaux impliqués dans la régulation du stress, l'activité physique peut aider à restaurer l'équilibre neurochimique perturbé par le harcèlement scolaire.

Une étude de Davis et al. (2011) a révélé que l'exercice modéré à intense améliore les fonctions exécutives chez les enfants tout en réduisant les symptômes d'anxiété et de dépression. Ces effets, à la fois sur le bien-être mental et la santé physique, montrent que l'exercice est une intervention clé pour atténuer les conséquences biologiques du harcèlement.



Les approches pharmacologiques face au harcèlement des enfants

Dans certains cas, des interventions pharmacologiques peuvent être nécessaires pour contrer les effets biologiques du harcèlement, notamment chez les enfants présentant des troubles psychologiques sévères. Les antidépresseurs, comme les inhibiteurs sélectifs de la recapture de la sérotonine (ISRS), sont parfois prescrits pour traiter les symptômes de la dépression et de l'anxiété liés au harcèlement (Cipriani et al., 2016). Ces médicaments peuvent aider à rétablir les déséquilibres chimiques dans le cerveau, notamment dans les circuits régulant l'humeur et le stress.

Cependant, l'utilisation de médicaments doit être considérée avec précaution, surtout chez les enfants. Les interventions pharmacologiques sont généralement combinées avec des approches psychothérapeutiques et comportementales pour maximiser les bénéfices tout en minimisant les risques d'effets secondaires et la surmédicamentation. En effet, la surmédicamentation des enfants est un phénomène préoccupant qui soulève de nombreuses questions aujourd’hui, comme abordé dans cet article de La Tribu Happy Kids dédié à l’extrême médicamentation des enfants.



En conclusion, le harcèlement scolaire a un impact profond non seulement sur le bien-être psychologique des enfants, mais également sur leur développement biologique. Les changements dans le système de réponse au stress, les altérations cérébrales et les modifications épigénétiques illustrent comment les expériences négatives de l'enfance peuvent avoir des répercussions durables sur la santé physique et mentale. Cependant, des interventions précoces, telles que la thérapie cognitivo-comportementale, le soutien social, l'activité physique et, dans certains cas, les traitements pharmacologiques, peuvent aider à contrer ces effets et favoriser le développement sain des enfants. 


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Sources

Cipriani, A., Zhou, X., Del Giovane, C., Hetrick, S. E., Qin, B., Whittington, C., ... & Xie, P. (2016). Comparative efficacy and tolerability of antidepressants for major depressive disorder in children and adolescents: A network meta-analysis. The Lancet, 388(10047), 881-890. 

Copeland, W. E., Wolke, D., Angold, A., & Costello, E. J. (2014). Adult psychiatric outcomes of bullying and being bullied by peers in childhood and adolescence. JAMA Psychiatry, 71(8), 881-889. 

Davis, C. L., Tomporowski, P. D., Boyle, C. A., Waller, J. L., Miller, P. H., Naglieri, J. A., & Gregoski, M. (2011). Effects of aerobic exercise on overweight children's cognitive functioning: A randomized controlled trial. Research Quarterly for Exercise and Sport, 82(3), 512-523. 

Durlak, J. A., Weissberg, R. P., Dymnicki, A. B., Taylor, R. D., & Schellinger, K. B. (2011). The impact of enhancing students’ social and emotional learning: A meta-analysis of school-based universal interventions. Child Development, 82(1), 405-432. 

Gonzalez, A., Monzon, N., Solis, A., Jaycox, L. H., & Langley, A. K. (2014). Cognitive-behavioral treatment of posttraumatic stress disorder in children and adolescents: A review of the evidence. Behavioral Psychology, 22(3), 405-431.

Gunnar, M. R., & Quevedo, K. (2007). The neurobiology of stress and development. Annual Review of Psychology, 58, 145-173. 

Hostinar, C. E., Sullivan, R. M., & Gunnar, M. R. (2014). Psychobiological mechanisms underlying the social buffering of the hypothalamic-pituitary-adrenocortical axis: A review of animal models and human studies across development. Psychological Bulletin, 140(1), 256-282. 

Johnson, C., Burke, C., Brinkman, S., & Wade, T. (2016). Effectiveness of a school-based mindfulness program for transdiagnostic prevention in young adolescents. Behaviour Research and Therapy, 81, 1-11. 

Lereya, S. T., Copeland, W. E., Zammit, S., & Wolke, D. (2015). Bully/victims: A longitudinal, population-based cohort study of their mental health. Journal of the American Academy of Child & Adolescent Psychiatry, 54(6), 461-469. 

McEwen, B. S. (2012). Brain on stress: How the social environment gets under the skin. Proceedings of the National Academy of Sciences, 109(Supplement 2), 17180-17185. 

Ouellet-Morin, I., Odgers, C. L., Danese, A., Bowes, L., Shakoor, S., Papadopoulos, A. S., ... & Arseneault, L. (2011). Blunted cortisol responses to stress signal social and behavioral problems among maltreated/bullied 12-year-old children. Biological Psychiatry, 70(11), 1016-1023.

Ouellet-Morin, I., Danese, A., Bowes, L., Shakoor, S., Ambler, A., Pariante, C. M., ... & Arseneault, L. (2013). A discordant monozygotic twin design shows blunted cortisol reactivity among bullied children. Journal of the American Academy of Child & Adolescent Psychiatry, 52(6), 615-623. 

Teicher, M. H., Samson, J. A., Anderson, C. M., & Ohashi, K. (2016). The effects of childhood maltreatment on brain structure, function and connectivity. Nature Reviews Neuroscience, 17(10), 652-666. 

Voss, M. W., Nagamatsu, L. S., Liu-Ambrose, T., & Kramer, A. F. (2013). Exercise, brain, and cognition across the life span. Journal of Applied Physiology, 111(5), 1505-1513. 

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